Grimbergen : retour au bercail ?

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Lorsque dans dix ans, l’abbaye belge de Grimbergen fêtera ses 900 ans, elle aura peut-être la fierté de voir la production de la bière qui porte son nom revenir à proximité de la localité belge qui l’abrite.

Petit village des environs de Bruxelles, Grimbergen n’a plus vu de production de bière depuis la Révolution française, depuis que des soldats ont démoli abbaye et brasserie dans leur élan révolutionnaire. Si les moines de Prémontré purent réintégrer les lieux quarante ans après l’évènement tragique, leur brasserie ne fut jamais reconstruite et la bière ne fut plus qu’un lointain souvenir, jusqu’en 1957, année où la brasserie belge Alken Maes lança, en accord avec le monastère, la production d’une bière de la marque Grimbergen.

Depuis lors, l’abbaye bénéficie de royalties versées par les brasseurs qui utilisent son nom. Cette redevance constitue un apport non négligeable pour cette petite communauté dirigée par Erik De Sutter. Elle dispose en effet de structures plutôt enviables comprenant notamment un restaurant géré par une société extérieure, un observatoire astronomique et une bibliothèque recelant près de 35 000 ouvrages. Le dimanche soir, les moines se réunissent… autour de quelques bières Grimbergen. Cependant, cette bière offre une autre spécificité : celle d’être brassée en Belgique mais aussi en France par Brasseries Kronenbourg. En effet, à la faveur des rachats qui ont agité le monde brassicole ces dernières décennies, la brasserie alsacienne passant dans le giron de Scottisch & Newcastle dans les années 2000 se met à produire de la Grimbergen.

Profitant de l’essor qui entoure les bières d’abbaye, la marque a connu des années durant une croissance à deux chiffres, portée par ses nombreuses déclinaisons : ambrée, blanche, ruby, poire, triple et Héritage, dernière recette créée. L’année passée, rien qu’en France, 561 millions d’hectolitres ont été écoulés, des ventes qui ont crû de 24,5 %. Et Grimbergen dispose de positions enviables dans les becs pression des CHR. Cette croissance dynamique ne concerne pas que la France. La barre du million d’hectolitres a été franchie l’an dernier au niveau mondial. Revers de la médaille, la production commence à peser pour l’unique brasserie de Kronenbourg, située à Obernai. La plus grosse unité brassicole française connaît un début de saturation en raison du développement actuel du marché. Ainsi, le groupe Carlsberg songe sérieusement à rapatrier la production spécifique de Grimbergen dans la région du village qui l’a vu naître. Cette solution aurait en outre l’avantage d’offrir une légitimité accrue à cette bière qui arbore l’image du phénix, emblème de l’abbaye depuis 1629 avec la devise Ardet nec consumitur, signifiant « Brûle mais ne se consume pas ».

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